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Par Jean Wesley Pierre

Ce 21 avril 2025, un silence inquiétant règne dans les établissements scolaires du Cameroun tout comme en Haïti. Ce n’est pas celui de la concentration studieuse ou d’une salle de classe bien disciplinée, mais celui d’une grève générale sans précédent, initiée par le Collectif des Organisations des Enseignants du Cameroun (COREC). Regroupant une vingtaine de syndicats du primaire et du secondaire, cette mobilisation nationale baptisée « École morte » n’est pas qu’une simple protestation : c’est le cri du cœur d’un corps enseignant à bout de souffle.

Ce mouvement dépasse largement les revendications salariales. Il traduit un malaise profond, enraciné dans un système éducatif en déliquescence. Le COREC dénonce l’inertie d’un État englué dans des promesses non tenues et prisonnier d’un modèle hérité d’une époque révolue. Neuf ans d’attente pour un Forum national de l’éducation promis mais jamais organisé. Des enseignants toujours en attente de rappels salariaux, d’un statut digne de leur fonction, de conditions de travail décentes. Et face à eux, un gouvernement perçu comme indifférent, voire méprisant.

Cette grève n’est pas improvisée. Elle est le fruit d’années d’accumulation de frustrations, d’annonces sans lendemain et de dialogues de sourds. Les enseignants, épuisés et dévalorisés, n’ont désormais plus foi en des négociations qui se soldent trop souvent par des silences administratifs. Pour eux, la coupe est pleine.

Mais au-delà de la colère, cette grève révèle une urgence nationale : celle de repenser en profondeur l’éducation au Cameroun. Loin des slogans et des discours officiels, le terrain dresse un constat alarmant : pauvreté d’apprentissage, précarisation du personnel, sous-investissement chronique… Dans les salles de classe, ce sont des générations entières qui paient le prix d’une négligence institutionnelle.

Le mot d’ordre est clair : si le gouvernement n’entend pas ce cri d’alerte, la protestation s’intensifiera. Le COREC a donné le ton : grève totale dès le 21 avril, et poursuite de la mobilisation en cascade jusqu’à obtention d’actes concrets. Il ne s’agit plus de négocier des miettes, mais de reconstruire l’école camerounaise sur des bases solides, justes et équitables.

Le gouvernement a bien tenté de répondre, annonçant une session de dialogue avec les syndicats fin mars. Mais la méfiance est de mise. Trop de promesses ont été faites, trop peu ont été tenues. Pour les enseignants, il ne s’agit plus de participer à une énième table ronde sans lendemain. Ils réclament des actes, pas des mots.

À l’heure où les défis éducatifs mondiaux imposent des réponses ambitieuses, le Cameroun donne l’image d’un système à l’abandon. Pourtant, il n’est pas trop tard. Cette mobilisation historique peut être un point de bascule, à condition que le gouvernement saisisse l’ampleur du moment. Car c’est bien l’avenir du pays qui se joue ici. Former la jeunesse, c’est bâtir la nation. Ignorer cette grève, c’est hypothéquer l’avenir.

Avril 2025 pourrait être un tournant décisif. Reste à savoir si les autorités auront le courage politique d’écouter et d’agir, enfin. Car le silence, lui, résonne déjà comme un échec.

Catégories : Internationale

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