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Par Jean Wesley Pierre

Washington / Port-au-Prince le 18 avril 2025 – Alors que la crise sécuritaire en Haïti atteint des niveaux critiques, les États-Unis étudient une mesure radicale : classer les gangs haïtiens « Viv Ansanm » et « Gran Grif » comme organisations terroristes. Une décision qui pourrait non seulement renforcer les poursuites judiciaires contre leurs membres, mais aussi mener à leur incarcération dans la tristement célèbre « méga-prison » du Salvador, symbole de la guerre sans merci du président Nayib Bukele contre les gangs. Une perspective accueillie avec espoir par certains en Haïti, malgré les controverses.

Depuis des mois, Haïti sombre dans le chaos. Les gangs contrôlent près de 85 % de la capitale, Port-au-Prince, selon l’ONU, multipliant enlèvements, massacres et trafics. Face à cette spirale, Washington envisage désormais de recourir à son arsenal antiterroriste. Le classement des gangs comme entités terroristes permettrait de cibler leurs soutiens financiers internationaux, gelant leurs avoirs et poursuivant leurs membres partout dans le monde.

Mais le plus surprenant réside dans la proposition rapportée par le Miami Herald : les figures capturées pourraient être envoyées au Centro de Confinamiento del Terrorismo (CECOT), un complexe pénitentiaire salvadorien conçu pour 40 000 détenus, où les conditions de vie draconiennes font polémique.

Si la mesure choque par son caractère extraterritorial, elle trouve un écho favorable chez certains Haïtiens épuisés par l’insécurité. « Cela brise l’impunité. Ces gangs tuent, violent, brûlent nos maisons en toute liberté. Si les États-Unis et le Salvador peuvent nous aider à les neutraliser, nous soutenons », lance une jeune étudiante en sociologie à l’université d’état d’Haïti, « du moment qu’on peut vaquer à nos activités, je suis d’avis accepté l’aide des autres tout en mettant un point d’honneur sur notre fierté » déclare la coordinatrice d’une association de victimes à Cité Soleil, sous couvert d’anonymat.

Du côté des autorités haïtiennes, fragilisées par des mois de vide politique, l’idée est perçue comme un appui crucial. Un employé du ministère de la Justice, sous couvert d’anonymat, confie : « Nous n’avons pas les ressources pour juger ces criminels ici. Les transférer à l’étranger pourrait permettre de désarticuler les réseaux plus efficacement. »

Le choix du Salvador comme destination interroge. Le CECOT, où des milliers de membres de gangs croupissent dans des cellules surpeuplées sous surveillance militaire, est régulièrement dénoncé par des ONG pour des violations des droits humains. Pourtant, le taux d’homicides y a chuté depuis la politique de « main de fer » de Bukele – un résultat qui séduit certains.

L’ externalisation de la justice soulève toutefois de vives critiques. « C’est un précédent dangereux, s’alarme Amanda Fisher, de Human Rights Watch. Cela revient à déléguer la justice pénale à des pays tiers, sans garantie de procès équitables. » Des voix haïtiennes dénoncent aussi une ingérence : « Où est la souveraineté d’Haïti si ses citoyens sont jugés et emprisonnés à l’étranger ? », interroge le sénateur Jean-Baptiste Laurent.

Pourtant, pour des millions d’Haïtiens, la priorité reste la survie. Alors que les discussions se poursuivent à Washington, beaucoup osent espérer que cette initiative, malgré ses zones d’ombre, marquera un tournant dans leur quête désespérée de paix.

La Maison Blanche doit se prononcer d’ici la fin du mois. Une décision qui pourrait redessiner les alliances et les méthodes de lutte contre le crime organisé dans les Amériques.

Catégories : Atualités

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